Peu de temps après avoir lu Saint Augustin, nous dit-il, je suis tombé sur un texte de Rûmî. J’étais dans le soufisme à cette époque, et cet écrit m’a marqué. Il touche encore un autre aspect de la mémoire. Ce texte disait :
« D’abord, tu fus minéral,
Puis tu devins végétal.
Ensuite tu es devenu animal.
Comment peux-tu ignorer cela ?
Puis tu fus fait homme, doué de connaissance, de raison et de foi.
Quand tu auras transcendé la condition d’homme,
Tu deviendras sans nul doute un Ange. »
Rûmî parle de l’être humain, il ne parle pas d’un extraterrestre. Il me convie à me rappeler que je fus, dans mon incarnation première, minéral. Puis, ayant perdu cette mémoire, je devins végétal. Et ensuite, je devins humain. Puis je deviendrai un Ange et je continuerai ainsi à travers d’autres degrés de transformation.
En quelques phrases, ce Maître Soufi me donne la possibilité de comprendre l’Amour que j’ai pour les fleurs, pour les plantes, pour les animaux. Ce sont des mémoires. Et ces mémoires ne sont pas dans le cerveau, elles constituent mon corps humain. Elles sont dans le monde profond de la cellule, de la musculation, de mes os.
Les Hermétistes chrétiens connaissaient cela aussi. Maître Eckhart parle de la nature minérale, végétale, animale et divine de l’homme ! Dans toutes les civilisations qui ont régné sur terre, ces connaissances liées aux mémoires minérale, végétale, animale, humaine et divine ont existé. Elles étaient là dès l’origine du chamanisme. Je me demande pourquoi elles ont été oubliées.
J’ai lu très attentivement ce texte de Rûmî et cela m’a profondément interpellé. « D’abord, tu fus minéral... » Je me suis alors demandé s’il restait quelque chose de minéral dans mon corps. J’ai tout de suite pensé à la matière osseuse, sans laquelle je ne serais qu’une masse informe. Sans elle, je vivrais par terre. La verticalité est née grâce au minéral.
J’ai donc regardé mon squelette comme une source de mémoire et, dans mes premiers contacts sensitifs que j’ai eu avec lui, j’ai noté qu’il n’y avait pas d’émotion, pas de sentiment, pas de considération intérieure ou extérieure. Mon squelette se contrefout de l’autre. J’ai commencé ainsi à sentir quelles étaient les particularités de la mémoire minérale.
Puis j’ai vu que cette mémoire était un socle essentiel. S’il n’y avait pas la connexion avec la mémoire minérale, tout l’édifice des mémoires n’existait pas. C’était comme un château de cartes qui tombait. Parce que le monde minéral constitue la première mémoire et c’est une mémoire colossale. Le premier monde vivant, que créa le big-bang, fut le monde minéral. Ensuite vint à la vie à travers l’eau puis à travers les végétaux.
Luis Ansa
Extrait de « Luis Ansa La Voie du Sentir » de Robert Eymeri
Peinture de Dragan Ilić Di Vogo (www.divogo.com)
☥ Christelle Gacon - Honorer le Féminin Sacré ☥
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